Dans la rue

Je suis deja bien loin, presque arrivée au domaine du cirque, mais son parfum me titille toujours l'odorat, aurais-je fait un mauvais choix, la bas dans cette rue de LoneDonne ? j'aurais peut-être du rester encore un peu ? ou pas...

C'est trop tard maintenant, l'instant est passé, tout en laissant un gout sucrée pour ceux qui savent l'apprécier, je me demande s'il en fait partie...
Je ne connais même pas son nom, a peine le son de sa voix...
Je ne sais qui est-il, ni ce qu'il fait, rien ne le différencie d'un de ces rêves qui vous réveille dans un sursaut, les joues en fièvres...
Rien ou si peu de choses...

Juste un baiser fougueux, un défit...
Si peu, tellement...

Qui es-tu ? et pourquoi ce besoin de te prouver ma valeur ?
D'habitude ces le moindre de mes soucis, ma valeur, qui pourrais comprendre, qui voudrais comprendre...
Princesse des rues sales, ça n'a aucune valeur...

Couchée sur mon lit, j'inspire le parfum de confiserie qui berce ma chambre, pour chasser le sien, histoire de l'oublier au plus vite, le ranger dans le coin des rêves irréalisables....

Je l'ai laissée partir, je l'ai oubliée...

Oublié, le goût sucré de ses lèvres
Oublié la douceur de sa bouche
oublié cette peau dévoilée sous la poudre envolée.
Oublié son corps chaud lové contre le mien.
Oublié la courbe de ses hanches sur laquelle se sont appuyées mes paumes
Oublié le moelleux de ses seins trop vite enfuis.
Oui, j'ai tout oublié.
Et pourtant....
Tout à mon oubli, tout à mes oublis, j'ai laissé mes pieds, ces sales traitres choisir le chemin...

Et me voilà, au détour d'un chemin défoncé, découvrant la placette, les roulottes parquées et le chapiteau aux couleurs vives, planté en son centre, son ouverture ténébreuse comme une invite, comme une promesse.

Cette bouche sombre m'appelle et me happe... Mais je résiste.... Pour l'instant.
Elle est là, quelque part.. Mais où ?
Marquise, Gourmandise, où donc te caches-tu ?
J'hésite...
Me diriger vers les roulottes ? Pénétrer sous le chapiteau ?

Qu'importe le ridicule. Autant appeler...
Marquise ? Marquise !!

Je ne suis plus dans mon cocon rouge, non la décoration a changée…
Un endroit sombre et humide m'accueille dans ses bras sordides maintenant
Quelques couinement de rats se font entendre au loin, ce ne sont pas les miens je ne les reconnais pas ceux la...
J’ai peur, j’ai froid...
Assise dans un coin, les genoux ramenés sous mon menton, j’attends je ne sais quoi, je ne sais qui
Soudain une petit lueur jaillit au plus profond de ce qui a l’air d'être un couloir et cette voix...

Marquise ? Marquise !!

Réveille en sursaut, sueur froides, brusque retour a la réalité, trop brusque mais tellement attendu...
Assise dans mon lit je scrute l'obscurité en recherche de quelconque point de rattache
Ou suis-je...
Ma chambre, oui...
Le Cirque, Lady...

Et cette vois dans ma tête

Marquise ? Marquise !!

Ça vient de l'extérieur ! Mais qui s'aventurerais jusqu’ici en pleine nuit ?
Les pieds nues je m’avances vers les yeux de l’elephant qui me servent de fenêtres
Je cherche, mais je ne trouve rien...
Sauf cette chose un peu blanche qui viens de me passer devant les yeux, la juste a l'orée du bois...
Serait ce....
Non....

Je descend l’escalier et sort de l’elephant en priant que l’importun ne crie plus au risque de réveiller tout le monde !
Mes yeux s’habitue peu a peu au noir ambiant, pendant que j’avance dans l’herbe mouillées

Je suis la, qui êtes vous ?

Ce parfum...

Brusquement, une pâle silhouette surgit de l'obscurité, fantomatique, les pieds plongés dans les volutes de brume qui s'échappent du sol herbeux.
Elle s'approche, apparemment sans peur, lumière dans la nuit, à peine vêtue d'une chemise, comme une robe de communiante, ou un suaire...

Avant sa voix , je reconnais son parfum de candy et de caramel.

C'est moi...
Moi ? Se souvient-elle ? Elle ne connait même pas mon nom...


Le mieux est de s'approcher. Qu'elle me reconnaisse. Ne suis-je pas revenu pour elle ?
Je m'apprête à reprendre là où elle s'est enfuie, mes mains se font déjà happantes, serres avides de ramener leur pitance au bas ventre lorsqu'un rayon de lune éclaire son visage.
Je décèle dans les ténèbres de son regard maquillé les vestiges d'une terreur nocturne, de celles qui nous parasitent depuis des lustres.
Son maquillage a coulé, le fard s'est détaché et elle me parait plus vulnérable soudain, plus...humaine.
Peut être aurais-je mieux fait de réfléchir, de peser le pour et le contre, d'afficher une contenance...
Mais instinctivement je suis venu et instinctivement j'agis.

Je m'avance près d'elle, enroule mes bras autour d'elle, une main sur la nuque, l'autre enserrant la taille, une embrassade, un salut, un contact, un réconfort. Un frisson contre un autre.

Six. Mon nom est Six.

Son parfum se fait de plus en plus envoutant
Et cette pensée, la , au milieu de toutes les autres, petit oiseaux affolé qui essaye de se frayer un chemin...
Comme un vestige du passée, un rêve jamais accomplie
Une rue de LonDonne, un jour comme tant d’autre, une rencontre

Je ne distingue pas encore son visage, juste cette lueur troublante au fond des yeux
Un mouvement de recule, instinct de survie, cœur affolé
Pourquoi cette faim dans les yeux ?
Il ressemble a tous ses loups qui bercent mes nuit de leur cris affamés
Les bras croisés sur ma robe de chambre, je frissonne
Panique, crier ? ils sont trop loin avant qu’ils n’arrivent, il sera deja trop tard
Courir ? il me rattraperait
Je reste la, immobile, sous la lune blafarde, priant je ne sais qui, que ce soit juste un jeu de lumière

Il s’approche, légèrement affolé, pourquoi ?
Crispée....
Il m’entoure des ses bras forts, petite poupée de porcelaine qui risque de craquer, sous une trop forte pression
Les yeux écarquillés, dans le noir, je ne comprend pas
Le cœur battant la chamade, je me noie dans son parfum, promesse de tendresse et ce frisson

Six. Mon nom est Six

Cette voix, montée de souvenirs, effluve de joie, chaleur
Lui...c’est lui !
Mais bras relâchent le tissus tout chiffonner de peur et s’installent dans son cou

Six....

Un nom, un nom pour un rêve inachevé
Je sent mes jambes trembler, trop d’emotions pour un si petit bout de femme
Mes doigts se resserrent sur son cou, dernier mouvement conscient
Je glisse....

Ses mains à la froide douceur dans la chaleur de mon cou.
Mon nom chuchoté comme une oraison.
Et un lent naufrage, corole nénuphare qui se soudain n'est plus là.

Je la retiens alors qu'elle se cambre, semblable à un sombre vampire assoiffé de virginité.
Tenant son cou si fragile, sa taille si fine, je jette un regard alentours.
Va-t-on croire à une agression ? Ses amis vont-ils sortir hurlant de leurs roulottes pour mener au bucher le supposé monstre dont l'habit perlé de poudre et le corps blanc entre ses bras prouvent le forfait ?

Mais la clairière reste déserte alors doucement je me baisse, son corps si précieux contre mon torse, doucement je m'agenouille, sa tête nichée dans mon épaule, ses jambes repliées sous elle dans l'herbe humide, sous une lune gibbeuse et indifférentes alors que ronronnent au loin les fauves de la ménagerie...

Posément, je caresse sa joue, qu'importe la poudre, tendrement je suis le dessin de sa bouche qu'importe le rouge. Le mouvement lent et rythmé de sa poitrine me rassure. J'hésite à la réveiller, à la secouer, alors qu'elle semble à présent si sereine, marquise de porcelaine...

Je m'interroge sur cet évanouissement. Lui ai-je fait si peur ? Ai-je été si terrifiant ? Qu'ai-je eu l'idée aussi de venir ainsi en pleine nuit...

Marquise...
Je murmure. Je ne connais même pas son nom, uniquement ce titre entendu dans la rue.
Marquise...
Réveille toi.
Parle moi.
Regarde moi.

Il fait doux dans ses bras, aucune once de frémissement nerveux
Juste un souffle calme et posé
J’y resterais bien, mais il m'appelle deja
Ouvrir les yeux, pas envie...
Encore juste un peu, laisse moi encore juste un peu être le centre de ton intérêt
Juste un peu, s’il te plait....
J’ai chaud dans ses bras, malgré le froid de la nuit
Regarde la lune, regarde comme elle m’envie tes bras !
Tes bras, rien qu’a moi, dans cette instant de tendresse instinctive
Encore...
Mais les loups s’agitent deja dans leur cages ouvertes
Pas habitués a de telle spectacle nocturnes
Pourquoi je ne les enferme pas !
Je dois ouvrir les yeux, sinon ils risquent de sortir, venir, s’assurer...
Le regard encore illuminé de se rêves ou je n'étais qu’a toi, je te scrute, paisible, rassurée

Six...

A peine auditible, pour ne pas te faire peur, pas briser ce silence profond de tendresse
Agrippée a ton cou, je me relève toute tremblante et sans lacher prise, ancrée dans tes yeux sombres...

Suis-moi il fait plus chaud la-bas

Je n’ai pas froid moi pourtant...
Mais les loups !
Et puis cette petite gêne la au fond de la gorge, gêne de m'être ainsi donnée en spectacle, sans raison apparente...

Voilà, ses yeux s'ouvrent, puits sombres où se noie la clarté de la lune.
Elle est revenue à elle. Et pourtant, je ne la lâche pas. Elle est peut être encore faible ? Et puis, de toutes façons, je n'ai pas envie.
Il y a des instants où on perçoit, comme dans une brume, la grâce et l'apaisement, où on jouit de l'instant car on sait qu'il va bientôt disparaitre.
Et il disparait.
Après avoir chuchoté mon nom, mon inconnue se relève, légèrement flageolante, s'appuyant sur moi, moi qui reste agenouillé, chevalier nocturne en quête d'adoubement.

Suis moi il fait plus chaud là bas.

Je me relève, lui prend la main, geste puérile, reste de chaleur trop vite enfuie, qu'elle me guide et m'entraine vers sa chaleur promise.

je m'avance avec elle, sur l'herbe, vers une masse sombre, une roulotte sans doute.
Je voudrais parler, la lier à moi par les mots, mais le son meurt sur mes lèvres, peur de dire, de demander, de décevoir. Alors je m'agrippe à sa main comme à une bouée et la suis, dans le sillage de sa fragance.

Étrange silence qui guide nos pas, alors qu’on s’avance vers ma chambre...
J’espere que je ne l’intimide pas au moins !
Deux timides pour partager la soirée, ce n’est pas le meilleur choix...
Choix, était-ce un choix ou je n’ai rien eu a redire ?
Le destin ? un des Dieux qui s’amuse a me jouer des tours ?
Un hasard ?
Qu’en sais-je, la et maintenant, mains dans la mains on monte deja l’esaclier en colimaçon qui guide vers la porte rouge.
Rouge j’ai toujours aimer le rouge, contraste frappant avec le blanc immaculé
Rouge sang, rouge coquelicot

Il me fait peur...
Pas une peur viscérale a en crier dans la nuit non, une peur a ne pas oser lever le regard vers le sien
Peur de rencontrer ses yeux dans le noir, gardien de mes joues rosissantes
Pourquoi m’intrigue t-il autant ? pourquoi bats tu si vite petit cœur, tu as deja bien appris a garder la tête froide pourtant, alors pourquoi ce soir recommence tu as chanter ?

Serais-ce ces yeux si sombres, ou ce visage que tu ne connais pas encore ?
Tu sais bien que je ne peux pas te laisser faire...
Vite les escaliers ! Je vais te tromper, tu vas battre a cause d’un effort !
J’escalade les marches en furie, il va me prendre pour une folle a courir comme ça...
Mais folle je suis, alors qu’importe !
Encore quelques marches...

Au fur et à mesure que nous progressons sur l'herbe rase, je distingue la roulotte, roulotte éléphant, pachyderme de bois et de fer.
Je ressens cette atmosphère fantasmagorique que diffuse notre couple, sous la lueur blafarde, tandis que grognent les fauves.
Nous pénétrons dans le ventre de la bête, Jonas désemparés cherchant refuge.
Au pied de l'escalier, où règne l'obscurité, je me retrouve contre elle, mon souffle sur sa nuque, quelques mèches éparses carressant mes lèvres. Je devine sa respiration qui s'accélère, la crispation quasi imperceptible des épaules. Lui fais-je peur ? Regrette-t-elle de m'avoir entrainé ?
Peut être devrais-je partir, lâcher sa main si douce, m'éloigner de son parfum, de son corps ?
Elle se met soudain à gravir en courant les escaliers.
Sans lâcher ma main.
M'entrainant.
M'invitant.
Je monte derrière elle, trébuchant dans les marches, tentant de me retenir d'une main sur la rambarde au bois lisse.
Nous voilà sur le palier, essoufflés.
Pourquoi avons nous couru ?
Un rire jaillit de mes lèvres alors que l'ouverture de sa chambre se découpe dans la lumière nocturne.
Un rire spontané, complice, de joie et de plaisir.
Je porte sa main à mes lèvres, y dépose un baiser dans le creux de sa paume, de remerciement, de tendresse, de promesses.
Entrons

Son rire, transperce la nuit
Et mon cœur s'arrête
Il me prend pour une folle, il se moque de moi
Le pied suspendu au dessus de la dernière marche
J'hésite, recule
Mes doigts se démêlent peu a peu des siens

Abandonnée...
Si seule, malgré sa présence qui me réchauffe encore un peu
Petite volute de chaleur qui laisse place a ce froid immense
La tête vidé, mes yeux se remplissent de larmes aussitôt ravalées
Ne pas se donner en spectacle, il a assez rit comme ça
Petite conne, tu y a tellement cru et regarde le résultat !
Le ciel devient sombre, les étoiles s'éteignent
Colère incontrôlable, pupilles dilatées

Frisson électrique
Son rire devient couteau et blesse ma peau, mon cœur
Je me retourne furieuse, contre moi, contre lui, contre cette naïveté qui me fait toujours tomber dans le panneau
Et...
Ma paume sur ses lèvres
Un baiser et tout s'évapore...

A nouveau perdu dans l'océan de ses yeux mes pas nous dans la chambre
Déjà la porte se referme derrière nous sur cette colère oubliée

Elle s'est brusquement retournée, violente et apeurée.
Le regard perdu aux sombres lueurs
Comme autant d'éclairs mauvais dans un ciel d'été.
Qui brusquement s'évaporent, lorsque mes lèvres frôlent ses doigts
laissant comme une saveur électrique d'ozone et de tension...

Elle m'entraine, referme la porte.
Je jette à peine un oeil dans la pièce, contours flous dans la pénombre.
Seule elle semble éclairée
Elle dont la taille si fine appelle mes mains
Elle, dont la brutale colère, si soudaine, si vite disparue, m'inquiète et m'attire.
Sa poitrine soudain contre mon torse...